Lettre ouverte de Boga Sako Gervais à HOLLANDE du 14 juillet 2014



A
M. François HOLLANDE
Président de la République 
de FRANCE.
(LETTRE OUVERTE)

MONSIEUR LE PRESIDENT HOLLANDE,
« On n’est pas fier de vous recevoir en Côte d’Ivoire! »
Au moment où la France et les Français célèbrent le 14 Juillet 2014, nous apprenons que le jeudi 17 juillet prochain, vous serez reçu en visite officielle en Côte d’Ivoire, par M. Alassane Dramane Ouattara et son régime.
Il est évident que les motivations principales de cette visite sont moins la situation des quinze à vingt milles ressortissants français vivant dans ce pays, que les intérêts économiques et militaires de la France ; vu que votre pays qui a perdu son triple A, s’effondre toujours un peu plus du fait de la crise économique qui frappe tout l’Occident. La Côte d’Ivoire qui se présente comme la locomotive économique des pays de la zone franc, malgré ses crises sociopolitiques successives, constitue donc pour la France, plus que jamais, la manne précieuse pouvant lui permettre de résister à la crise.
Ce qui explique sans doute pourquoi votre prédécesseur, M. Nicolas Sarkozy, se soit tant impliqué dans la crise postélectorale de fin 2010 et qu’il ait tant engagé l’armée française dans le dénouement tragique de cette crise ; rien que pour installer son ami Ouattara au pourvoir. Ainsi, la France pourrait profiter des richesses de la Côte d’Ivoire comme elle le souhaiterait.
On pourrait toutefois concéder aux dirigeants de la France le juste droit de veiller sur les intérêts français dans le monde et surtout en Afrique, certes ; mais jamais nous ne pardonnerions à la France de marcher sur des corps et dans le sang d’Africains et d’Ivoiriens, dans le simple but de s’accaparer nos richesses, par le truchement d’un de leur pion planqué à la tête de notre pays.
MONSIEUR LE PRESIDENT HOLLANDE,
« On n’est pas du tout fier de vous recevoir en Côte d’Ivoire ! »
En effet, depuis septembre 2002, beaucoup d’Ivoiriens et des amis de la Côte d’ivoire sont déçus de la France, lorsque le Président Jacques Chirac, son premier ministre Dominique De Villepin et son ministre de la Défense Michèle Alliot-Marie osèrent légitimer la rébellion ivoirienne à Marcoussis, en hissant les rebelles dans le gouvernement, plutôt que d’aider les dirigeants légitimes de l’époque à les neutraliser et à les désarmer.
On est encore plus déçu de la France, lorsqu’en novembre 2004, ses soldats osèrent tirer sur des civils ivoiriens aux mains nues devant l’Hôtel Ivoire et qu’en mars 2011, sous un fallacieux prétexte de la Résolution 1975 de l’Onu, ils bombardèrent la résidence présidentielle ivoirienne, en exterminant tous ces jeunes qui s’y étaient constitués en bouclier humain. Ces actes criminels ont largement contribué à accroître le nombre des morts et des disparus de la crise, ainsi que celui des blessés à vie, au sein de la population civile ivoirienne. Aussi, après avoir tenté de l’éliminer par les bombardements, les soldats français se saisirent-ils du Président Laurent Gbagbo, le 11 avril 2011, qui sera torturé par les rebelles à Korhogo, avant d’être remis à la Cour pénale internationale (CPI), le 30 Novembre 2011. Et c’est en héros que M. Sarkozy fut accueilli le 21 mai 2011 à Yamoussoukro, à l’investiture de M. Alassane D. Ouattara ; comme il sera triomphalement ovationné le 15 septembre 2011 à Bengazi, en Lybie post-Kadhafi. Autant de comportements indignes, qui justifient qu’il soit actuellement mis en examen par la justice française, après avoir subi environ quinze heures de garde à vue.
Cependant, malgré le transfèrement du Président Laurent Gbagbo à la CPI, où il fut rejoint le 22 mars 2014 par le Ministre Charles Blé Goudé ; et malgré l’emprisonnement de près d’un millier d’Ivoiriens se réclamant de M. Gbagbo, dont son épouse Simone Ehivet, l’Etat de droit et les Droits de l’Homme continuent d’être gravement violés en Côte d’Ivoire sous M. Ouattara, dont le régime s’apparente plutôt à une véritable dictature.
Comme le témoignent la plupart des rapports des Organisations nationales et internationales des Droits de l’Homme, les traques, les chasses à l’homme, les arrestations arbitraires, les séquestrations, les brimades, les tortures et les exécutions sommaires contre les personnes dites « pro-Gbagbo » et contre d’innocentes victimes, se sont poursuivis jusqu’à ces derniers jours. Les cas particuliers des détenus au secret que sont Mme Simone Ehivet-Gbagbo, les Sous-officiers et Officiers supérieurs des Forces de Défense et de Sécurité (FDS), tels que Dénis Dogbo Blé, Anselme Séka Séka ou Jean-Noël Abéhi demeurent très préoccupants et inquiétants. Certains détenus seraient-même sodomisés pendant leur interrogatoire par des individus appartenant aux Frci et dozos « pro-Ouattara ». Autant de pratiques qui, ajoutées aux tortures, précipitent des ex-prisonniers vers la mort, comme ce fut le cas du syndicaliste Basile Mahan Gahé ou du Commissaire de Police César Négblé.
Pendant ce temps, la Justice ivoirienne ou la CPI continuent de se comporter en ‘’Justice des vainqueurs’’, en ne poursuivant que les « pro-Gbagbo » et en ignorant totalement les « pro-Ouattara » pourtant auteurs de crimes graves : on peut citer ceux qui furent révélés au monde par la Croix Rouge, le 29 mars 2011 à Duekoué, ou ceux commis dans le camp des réfugiés de Nahibly, le 20 juillet 2012.
La Communauté internationale dont vous faites partie aurait-elle vraiment décidé de sacrifier le seul Président Laurent Gbagbo et ses proches, en épargnant les rebelles ivoiriens qui tuent et violent toujours davantage les Droits de l’Homme depuis 2002 et qui sont aujourd’hui propulsés au sommet de l’Etat ivoirien ? Souhaiteriez-vous une guerre civile en Côte d’Ivoire ?
MONSIEUR LE PRÉSIDENT HOLLANDE,
Que venez-vous donc faire en Côte d’Ivoire ?
Venez-vous, comme on est en droit de le penser, rassurer le régime au pouvoir et lui apporter votre soutien, afin de mieux préserver vos intérêts et ceux de la France affaissée ? Venez-vous encore proposer de nouvelles armes assassines et renouveler la coopération militaire avec ce régime dictatorial, afin de garantir un second mandat 2015-2020 à M. Ouattara ?
Ou alors, venez-vous pour aider les populations ivoiriennes à réclamer à M. Ouattara et à ses amis du RHDP, l’application de la Démocratie et de l’État de droit ; le respect des Droits de l’Homme ; la Justice juste et équitable ; la bonne gouvernance ; le respect des libertés publiques et des garanties fiables pour des élections apaisées…, toutes choses qui conditionnent la Paix ?
M. LE PRÉSIDENT HOLLANDE, LES IVOIRIENS ET LES AFRICAINS D’AUJOURD’HUI ET DE DEMAIN VOUS REGARDENT, VOUS ET LA FRANCE !

Fait à Rome, ITALIE, le 14 Juillet 2014

Dr BOGA SAKO GERVAIS
Enseignant-Chercheur à l’Université de Côte d’Ivoire ;
Ex-Membre de la Commission Nationale des Droits de l’Homme
de Côte d’Ivoire (CNDHCI) ;
Président de la Fondation Ivoirienne pour Les Droits de l’Homme et la vie Politique (FIDHOP) ;
Ecrivain-Essayiste.




Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Bernard DADIE et Laurent GBAGBO

MOCARES KOUASSI NGUESSAN : POUR L’AMOUR ET LA MEMOIRE DES SIENS !

VALLS AU CHEVET DE OUATTARA = COMPLICITE DE CRIMES CONTRE L'HUMANITE